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Antisionisme = antisémitisme ? dans L’Anticapitaliste

lundi 24 septembre 2018 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Paru dans L’Anticapitaliste, 7 juin 2018.

Comme son sous-titre l’indique, ce petit ouvrage est une réponse à Emmanuel Macron qui, non content d’inviter Benyamin Netanyahou, chef du gouvernement de l’État d’Israël, à la commémoration du Vél d’Hiv’ en juillet dernier avait, dans son discours, tiré un trait d’égalité entre antisionisme et antisémitisme.

Sionisme, antisionisme
Écrit avec talent, concision et beaucoup de pédagogie, ce livre revient sur l’histoire du judaïsme puis du sionisme, en insistant sur les contradictions historiques et religieuses au sein même de cette idéologie colonialiste et expansionniste.
De Maxime Rodinson, orientaliste marxiste, à Michel Warchawski, militant israélien de la cause antisioniste, aux historiens et sociologues postsionistes comme Ilan Halevi ou Shlomo Sand, Dominique Vidal déconstruit les velléités de beaucoup, dont le CRIF, d’englober dans un même concept accusateur l’antisionisme et l’antisémitisme.
En puisant dans l’histoire de la judéophopie puis de l’antisémitisme, des croisades aux pogroms dans la Russie des tsars en passant par l’expulsion des juifs d’Espagne et du Portugal jusqu’à la tragique « solution » génocidaire de la Shoah, Dominique Vidal démontre que la haine du juif s’est développée d’abord et avant tout en Europe, y compris dans le cadre d’un antisémitisme d’État.
De la même manière, il démontre, chiffres et exemples à l’appui, que seule une infime minorité de la diaspora juive a adhéré au projet sioniste. Nombre de courants religieux ou politiques (communistes, bundistes) d’origine juive s’opposèrent très tôt à l’idéologie sioniste et à son premier congrès mondial…

Le droit inaliénable de critiquer Israël
Dominique Vidal revient sur la situation faite aux Palestiniens, et aux conséquences de ce « conflit » asymétrique dans le monde, en particulier en France où les tenants du sionisme et du grand Israël ne cessent de stigmatiser les antisionistes et les défenseurs de la cause palestinienne au motif que toute critique et action contre la politique de colonisation guerrière d’Israël serait une attaque contre le peuple juif
Ce qui n’empêche pas Vidal de s’interroger, et d’interroger ses lecteurEs, sur une renaissance de l’antisémitisme, voire selon certains médias d’un « antisémitisme musulman » porté par les crimes horribles des djihadistes au cours des dernières années. Crimes qui alimentent à la fois le racisme, l’antisémitisme et l’islamophobie.
À la fois instructif et dynamique, l’ouvrage nous conduit aussi à réfléchir au sujet de l’État d’Israël et de sa politique inflexible de colonisation, d’agression à l’égard du peuple palestinien, vers un projet d’annexion de l’ensemble de la Palestine, remettant en cause l’idée des deux États sur ce territoire. Cette annexion, souhaitée par l’extrême droite israélienne (avec la quasi-bénédiction de Trump), en revient en effet à poser sur la scène internationale le perspective d’un seul État…
Mais celui-ci sera-t-il, comme le souhaitait le Matzpen (organisation socialiste et révolutionnaire israélienne) dans les années 1960, démocratique, laïque et socialiste, ou sera-t-il une nouvelle monstruosité inégalitaire baignant dans l’apartheid raciste et confessionnel ?
Paru à point nommé, ce livre d’à peine 120 pages pour 8 euros s’essaie avec justesse à bien nommer l’objet de son étude, pour poursuivre la réflexion et l’action.

Thomas Delmonte