Le blog des éditions Libertalia

Rosa Parks, Mon histoire dans L’Humanité

vendredi 1er mars 2019 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Paru dans L’Humanité du 28 février 2019.

Rosa Parks,
une vie derrière l’icône

D’elle, on retient ce geste de refus, de ceux qui fixent dans l’histoire des points de basculement. Le 1er décembre 1955, à Montgomery, Alabama, au sud des États-Unis, une couturière de 42 ans, Rosa Parks, assise à l’arrière d’un bus, là où l’usage et les règles racistes reléguaient les Noirs, refusait de céder sa place à un Blanc. Son arrestation : une flammèche qui devait embraser les consciences, au point que l’historien Howard Zinn remarque, dans son Histoire populaire des États-Unis, que « Montgomery allait servir de modèle au vaste mouvement de protestation qui secouerait le Sud pendant les dix années suivantes ». Du boycott des bus de Montgomery à la marche sur Washington, sept ans plus tard, un puissant mouvement de libération prenait corps. L’acte singulier de cette femme noire en fut l’un des déclencheurs, des catalyseurs. Dans la mémoire du combat pour les droits civiques, une image a figé Rosa Parks en icône muette : la photographie reconstituant un an plus tard la scène du bus, alors que la Cour suprême venait de casser les lois ségrégationnistes dans les transports. Mais par-delà l’emblème, qui est Rosa Parks ? Les éditions Libertalia publient son autobiographie, inédite en France, dans une traduction de Julien Bordier. Coécrit en 1992 avec le journaliste noir américain Jim Haskins, ce patient récit redonne chair et vie à la militante résolue qu’elle fut tout au long de sa vie.

En se racontant, cette arrière-petite-fille d’esclave brosse tout à la fois une fresque familiale et un saisissant tableau de la vie des Noirs dans le sud des États-Unis, dans la première moitié du XXe siècle, entre exploitation, humiliations, élans de révolte et descentes meurtrières du Ku Klux Klan. Son cheminement est celui d’une femme du peuple née à l’aube du siècle, en 1913, tôt engagée dans le mouvement naissant pour l’égalité des droits, pour l’abolition du racisme institutionnel. Au début des années 1940, elle fut parmi les premières femmes à rejoindre les rangs de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP, Association nationale pour la promotion des gens de couleur). « Pendant la moitié de ma vie, j’ai vu s’appliquer des lois et des usages qui séparaient les Africains-Américains et les Blancs dans le sud de ce pays. Des lois et des usages qui autorisaient les Blancs à traiter les Noirs sans aucun respect. Je n’ai jamais pensé que c’était juste et dès ma plus tendre enfance j’ai tenté de m’opposer à ce manque de respect », résume-t-elle.

Le geste d’insoumission de Rosa Parks fut un acte politique réfléchi, inscrit dans un combat collectif et non la simple manifestation d’exaspération isolée d’une travailleuse fatiguée. Elle-même s’en souvient en ces termes : « S’il y avait bien une chose qui me fatiguait, c’était de courber l’échine. » En 1964 et 1965, la loi sur les droits civiques puis celle sur le droit de vote furent promulguées. Rosa Parks, elle, a continué à militer sans relâche. Sans jamais s’habituer, de son propre aveu, au « symbole » qu’elle est devenue.

Rosa Moussaoui