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lundi 6 janvier 2025 :: Permalien

— REVUE de PRESSE —

Publié sur le site Ballast, le 27 décembre 2024.

Depuis quelques années, la révolte des Penn Sardin de Douarnenez connaît un regain d’intérêt dans les milieux militants et même plus largement. Ces ouvrières des conserveries où l’on met les sardines en boîte se sont mises en grève en novembre 1924 pour demander une augmentation de salaire et de meilleures conditions de travail. La lutte est rude et le patronat impitoyable. Elles sont appuyées par le maire communiste de la ville, Daniel Le Flanchec. Jusqu’à Paris, leur lutte suscite l’engouement. La CGT-U envoie Charles Tillon et Lucie Colliard les appuyer. Elles finissent par gagner et défaire le patronat. Cette histoire est racontée dans Une belle grève de femmes d’Anne Crignon. Dans Douarnenez, les références au mouvement fleurissent. Un siècle plus tard, Tiphaine Guéret, journaliste indépendante collaborant avec CQFD ou encore Panthère première n’a pas voulu « laisser le compteur bloqué sur le triomphal hiver 1924 et se satisfaire de la foklorisation de la grève ». Si la désindustrialisation a causé la fermeture de nombre de conserveries, il en reste encore trois à Douarnenez, dont deux de dimension industrielle : la maison Chancerelle et Petit Navire. L’autrice a décidé d’aller à la rencontre des travailleuses de ces usines, désormais reléguées dans la zone industrielle de la ville, loin du port. En effet, ce sont encore très majoritairement des femmes qui travaillent au conditionnement à la chaîne des sardines et autres poissons. La division genrée du travail n’a guère évolué depuis le début du siècle. Parmi elles, les intérimaires sont nombreuses, tout comme les femmes exilé·es, venues en quête de travail à Douarnenez. Si l’ambiance révolutionnaire et la solidarité ouvrière semblent parfois un souvenir lointain, il suffit d’une nouvelle grève en mars 2024 pour réveiller leur souvenir. Et c’est là le cœur du travail de Tiphaine Guéret : montrer que les ouvrières des conserveries ne sont pas qu’une image révolutionnaire en noir et blanc granuleux, mais qu’elles sont encore là aujourd’hui, toujours debout.

L.