Éditions Libertalia
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jeudi 19 mars 2009 :: Permalien
« Condamné à vie, je survis à l’ombre de murs depuis février 1987. Après plus de vingt ans de prison, les juges me reprochent la “permanence de ma conviction extrémiste et radicale”. Je ne sortirai pas cette année, ni la prochaine. » Ainsi s’achève le deuxième volet des Mémoires de J-M Rouillan, l’ancien leader d’Action directe réincarcéré en novembre 2008 alors qu’il jouissait d’un régime de semi-liberté depuis près d’un an. Dans son récit, il revient plus particulièrement sur les dernières semaines du Mouvement ibérique de libération (MIL) dont il a été l’un des membres. En filigrane, on suit le parcours de son camarade Salvador Puig Antich, qui fut le dernier condamné à mort politique à subir le supplice du garrot dans l’Espagne de Franco. Depuis Je hais les matins (Denoël, 2001), J-M Rouillan a publié huit livres. Dans celui-ci, on retrouve tout ce qui fait la force de cet auteur d’exception : une écriture très imagée, qui mêle expression des sens et souvenirs, apprentissage politique et mémoire militante. J-M Rouillan raconte ses années post-68, celles du « Mai piu senza fucile » (plus jamais sans fusil), celles où tout semblait possible. On a désormais hâte de lire la suite. Libérez-le !
« Derrière un pilier, près de l’entrée, quelques vétérans s’approvisionnent en revues avant de retourner dans la salle ravitailler en douce de vieilles connaissances. Tous en habit du dimanche, ils sont plus vieux les uns que les autres. Ce sont nos compagnons illégalistes, ceux de juillet 1936 de mai 1937, ceux de la collectivisation et du front d’Aragon, ceux de la Retirada et des camps de concentration, ceux des maquis et de la guérilla des années 1950. Ceux que nous appelions encore (malgré les quatre-vingt-dix ans passés de certains) les Juventudes, les « Jeunesses », parce qu’ils resteront affiliés à leurs organisations du temps de la révolution jusqu’à leur dernier souffle. À y regarder de près, ces vieux-là sont plus frais que de nombreux jeunes libertaires de l’après-68. À toute heure du jour et de la nuit, les Juventudes se tiennent prêts à l’aventure. Avec eux, impossible de rester désarmés – au cas où… ; sans faux papiers – au cas où… ; sans appartements clandestins – au cas où… Je suis certain que quelques-uns se sont fait enterrer avec leurs pistolets – au cas où… »
De mémoire, tome 2 de Jann-Marc Rouillan est publié chez Agone (lien).
vendredi 13 mars 2009 :: Permalien
(Relais d’un communiqué de la Fédération anarchiste)
« Depuis des années, les militantes et militants de la Fédération anarchiste, aidés par une multitude de sympathisants et sympathisantes, ont développé des outils au service de l’idéal anarchiste…
En 1977. ce fut notre journal, Le Monde libertaire, qui devint hebdomadaire et en 1981, la librairie du Monde libertaire (Publico), entrait dans ses murs au 145 de la rue Amelot. En 1998, Radio libertaire quittait une location à Montmartre pour un nouveau studio en propriété.
Et finalement, en 2001, achat d’un local pour le Monde libertaire.
Aujourd’hui, l’occasion nous est donnée d’agrandir l’espace militant parisien en nous portant acquéreur d’un local d’environ 140 m2 qui se trouve à côté de la libraire, au 143, rue Amelot. Cet espace permettrait la tenue de réunions publiques telles qu’une Université populaire libertaire, un ciné-club, des cycles de formation anarchiste, des débats, des rencontres avec des auteur-e-s, des expositions d’Art…
C’est dans cette perspective, qui pourrait se concrétiser au mois de juin. que nous lançons dès à présent une souscription sous deux formes :
des dons, par chèques, qui serviront au financement de rapport en numéraire,
des prélèvements qui permettront de rembourser un prêt que le Crédit Coopératif est disposé à nous accorder.
La décision de réaliser cet achat sera prise par notre Congrès fédéral de fin mai 2009 en fonction de tous les engagements financiers reçus. Les chèques et avis de prélèvements reçus ne seront pas mis en circulation avant juin 2009. »
Pour plus d’infos ou pour participer, contactez le Secrétariat de la Fédération anarchiste (lien).
jeudi 12 mars 2009 :: Permalien
Ekma Mouktaré est l’un des huit inculpés de l’incendie du centre de rétention de Vincennes. Arrêté à Barbès en juin 2008, il est enfermé au centre de rétention de Vincennes.
Né en 1991, il a alors 17 ans. Deux jours après son arrivée dans le centre, il fait partie des personnes qui découvrent le corps inerte de Salem Essouli. Le lendemain, il participe à la marche silencieuse organisée par les retenus pour lui rendre hommage et pour protester contre cette mort causée par le défaut de soins. Après l’incendie, Ekma est transféré dans un centre de rétention de Lille, il y passe encore trente jours. On lui annonce alors qu’il est libre... mais il ne le restera que quelques minutes car à la sortie du centre, des policiers l’attendent, lui annoncent cette fois qu’il est inculpé de l’incendie du centre et le rapatrient sur Paris. Il est alors interrogé au commissariat de Louis-Blanc puis emprisonné à Fleury-Mérogis. Il passe 4 mois sans aucune nouvelle de l’extérieur, comprenant à peine ce qui lui arrive d’autant qu’il comprend mal le français et le parle à peine : sa détresse est totale. Nous parvenons à entrer en contact avec lui en novembre, il reprend espoir, sa famille est informée de sa situation et lui assure un hébergement sur la région parisienne. Il a donc toutes les garanties de représentation exigibles pour un sans-papier. Plusieurs audiences et confrontations ont eu lieu, mais on continue à lui refuser sa liberté conditionnelle.
L’Etat veut faire des exemples et pour ce faire s’acharne contre lui et les sept autres inculpés de l’incendie du centre de Vincennes. A travers eux, l’Etat veut donner une leçon à tous les sans-papiers qui, comme les retenus du centre de Vincennes cet été, ou ceux du centre de Bordeaux et de Toulouse cet automne ou encore de Lampedusa cet hiver, entendent continuer à se révolter contre le sort que leur réserve la violence des politiques migratoires européennes.
Jeudi 12 à 14h, Ekma Mouktaré passe une fois de plus devant le juge. Il fait appel du refus de remise en liberté. Il a besoin que nous soyons là.
Rendez-vous TGI de Paris, métro Cité, devant la chambre d’instruction, escalier A, à 14H
Soyons le plus nombreux possible pour protester contre son emprisonnement et l’acharnement de l’Etat contre lui et tous les autres inculpés. Liberté pour tous les sans papiers et tous les prisonniers ! Liberté de circulation et d’installation !
lundi 9 mars 2009 :: Permalien
En passant en kiosques, Offensive, le trimestriel d’Offensive libertaire et sociale (OLS), a augmenté sa pagination. Au sommaire de ce numéro, outre un lot de chroniques, de brèves et d’articles d’actualité, on lira plus particulièrement le dossier portant sur l’industrie de la punition. Les rédacteurs s’attaquent à l’idéologie d’enfermement, rappelant que des quatre fonctions que la théorie pénale attribue à la prison (dissuader, punir, réparer le dommage causé aux victimes, rééduquer et prévenir la récidive), seule la fonction de punition semble efficiente. En effet, comme le rappelle Emmanuelle Rozier, « la prison rend malade. Être enfermé déstructure les repères fondamentaux de toute vie individuelle, empêche l’initiative, coupe les attaches relationnelles. » La prison tue, la prison rend fou. Il est temps de dynamiter collectivement le « grand renfermement » et son corollaire – la société de contrôle – et de trouver des formes de réponses sociales aux « déviances », dans le cadre d’une société libertaire.
Offensive, numéro 21, février 2009, 52 pages, 5 €.
Plus d’infos sur offensive.samizdat.net (lien).
lundi 9 février 2009 :: Permalien
Écrits rassemblés par Lou Marin (Égrégores éditions)
Camus est l’un des auteurs les plus importants du siècle passé. Le qualifier de « philosophe pour classe terminale » relève de la condescendance bourgeoise ou de l’ineptie post-stalinienne. Notre dette à l’égard de l’auteur de L’Homme révolté, Les Justes, Noces ou La Peste est immense.
Camus a décrit la beauté du monde méditerranéen, des corps et des sensations, il a magnifié la révolte, s’est interrogé sur l’usage de la violence révolutionnaire. Quand les intellectuels ne juraient que par Marx et le grand frère russe, il a renvoyé dos-à-dos l’impéritie libérale et le totalitarisme rouge. Il n’y a guère que sur l’Algérie qu’on peut le trouver timoré. On savait déjà que dans le contexte de guerre froide, Albert Camus avait refusé de se laisser récupérer par le camp atlantiste, contrairement à Koestler ou à Souvarine par exemple mais on n’imaginait pas qu’il avait été aussi proche du mouvement libertaire.
Dans ce volumineux ouvrage, à la facture impeccable, Lou Marin rend hommage à l’écrivain en décrivant ses liens avec la Fédération anarchiste, la revue Témoins, Pierre Monatte et La Révolution prolétarienne, la CNT en exil et Solidaridad Obrera ou encore Louis Lecoin. C’est Rirette Maîtrejean, correctrice à Paris Soir, ancienne coéditrice du journal L’anarchie qui sensibilisa Camus à la pensée libertaire. Lors de la publication de L’Homme révolté, Camus se fit remonter les bretelles par Gaston Leval pour sa méconnaissance de Bakounine. Mais dans les rangs anarchistes, tous saluèrent son exaltation des hommes libres. Au cours des années cinquante, à maintes reprises, le prix Nobel 1957 participa à des réunions publiques en faveur de l’Espagne libre. Il a partagé la fraternité et la solitude des libertaires.
En fin de compte, mieux vaut laisser la parole à Fernando Gomez Pelaez, le responsable de la Soli : « En vérité, il nous aida comme on aide des membres d’une famille dans le besoin, sans compter et de diverses façons, de la plus visible à la plus discrète : sur les tribunes, par l’écrit, mais aussi en nous ouvrant son carnet d’adresses, en nous prodiguant ses conseils, en nous cédant des droits sur ses textes, en nous soutenant financièrement quand manquait le nerf de la guerre. Camus était ce genre d’homme, rare, qui ne tirait aucune publicité ou gloriole de ses gestes de solidarité. Il insistait au contraire pour qu’on ne sache pas qu’il était à l’origine de l’envoi de telle ou telle quantité d’argent pour aider un compagnon emprisonné ou sa famille. Brassens agissait de même, sans rien demander non plus en retour, sauf le silence. Dans un monde de m’as-tu-vu où la bonne conscience a toujours un prix, ce genre de comportement méritait d’être signalé. »
Albert Camus et les libertaires (1948-1960)
Écrits rassemblés par Lou Marin, Égrégores éditions.
Ce livre est diponible dans notre librairie en ligne (lien).